Ce que nous sommes / Zep
Ce que nous sommes / Zep.- Paris : Rue de Sèvres, 2022, 87 p.
«On voulait faire un humain augmenté… On a créé l’humain assisté… Une régression.» (p. 83).
Ce que nous sommes en 2113 devenus, est un humain au cerveau augmenté, où l’intelligence et le savoir ne sont plus gérés par notre mémoire, mais par un centre de données informatique.
Pour ces hommes et femmes augmenté.e.s, Zep les dote d’un second cerveau numérique.
Plus besoin d’années d’études, d’apprentissage, dans un monde où les données du savoir transitent en quelques secondes de connexion d’un disque dur à un cerveau humain programmé.
Mais si un bug, un problème, une panne électrique effaçait le disque dur de cet homme du futur… à moitié virtuel…
Quelle utilité resterait-il à ce personnage soit disant augmenté, mais qui perdrait tous ses moyens face à une réalité, un monde réel qu’il continue d’habiter ? Mi-homme, mi-robot, ignorant les codes d’une planète où cette nouvelle espèce ne serait plus équipée pour vivre sur Terre… Qui aurait perdu tout souvenir d’un mode d’emploi pour survivre au jour le jour dans le monde réel… Au moment où ce miraculeux cerveau «augmenté» s’effacerait…
BD qui se dévore d’une traite !
Et qui est un éloge à une humanité plus naturelle, équipée d’une mémoire moins vaste qu’un ordinateur capable de stocker des milliards de données, mais dont la supériorité humaine est incontestable, dans la mesure où chaque savoir a été acquis pas à pas, et repose donc sur une mémoire plus difficile à effacer dans un instant. Mémoire défectueuse, qui se dégradera au fil des années, mais dans laquelle il restera toujours des traces, des bribes…
Ce que nous sommes sous le crayon de Zep incite à interroger le progrès technique, sa possible vacuité qui ôte le sens premier de nos vies. Qui ne sont augmentées que par le sens, la priorité personnelle que chaque homme, que chaque femme donne à ses jours. A décider ne pas vouloir être une machine, à consentir à n’être qu’un être fragile, capable de contradictions, mais également, de bonifications, et surtout d’émotions.
Et qui sait que sa super-puissance ne reposera jamais dans son aptitude à accroître la quantité de données emmagasinées au fond de son cerveau. Mais dans l’épaisseur, l’intérêt de ce que chaque information lui a fait ressentir, et dans l’impact que chacun de ces souvenirs a changé en lui. Sens et impressions liés à ces milliers de souvenirs que l’homme est le seul à connaître face à la pauvreté d’un centre de données où la quantité écrase par son poids toute qualité à être ou vivre.
© Véronique Meynier, le 03/09/2022. Article mis à jour le : 04/09/2022.
Commentaires
Enregistrer un commentaire