Térébenthine / Carole Fives : Conseil de Lecture
Térébenthine : roman / Carole Fives.- Paris : Gallimard, 08/2020, 172 p.
Conseils de lecture des romans de Carole Fives : Une Femme au téléphone ; Que nos vies aient l’air d’un film parfait ; Tenir jusqu’à l’aube ; Quelque chose à te dire.
Térébenthine, le dernier roman de Carole Fives avait comme titre initial : Je serai peintre.
Elle y brosse le portrait de Luc,
Lucie et la narratrice, tous trois étudiants à l’Ecole des Beaux-Arts.
Carole Fives, elle-même ancienne
étudiante des Beaux-Arts à Tourcoing, remet dans Térébenthine en
question la place prépondérante qu’a pris la théorie, la justification, le sens,
l’intelligence de l’œuvre de l’artiste, attendue aujourd’hui avant tout comme projet
intellectuel plutôt que comme œuvre brute, instinctive et faite dans la seule
émotion.
En effet, l’art brut est aujourd’hui
déconsidéré, dévalorisé comme étant rétrograde.
Ce n’est plus avant tout l’émotion
que l’on ressent devant une œuvre d’art qui est plébiscitée, appréciée. Mais
avant tout, la capacité de l’artiste d’expliquer son projet artistique, d’être
quasiment son propre critique.
Carole Fives défend ici une autre
approche, un autre désir : remettre au centre le regard, rendre à l’émotion
une place prépondérante.
L’art n’est pas qu’une question d’intelligence.
Une œuvre d’art ne cache pas toujours un second degré.
Térébenthine est avant
tout un roman d’apprentissage. Sur les choix faits à l’entrée de la vie adulte.
Être inscrit dans une Ecole des Beaux-Arts fera-t-il de tous les étudiant(e)s
des peintres ?
Le mauvais choix, la
réorientation, le doute, l’erreur font aussi partie de nos existences. Comme le
fait que nos expériences sont autant teintées des influences de nos
professeurs, que de nos pairs, qui s’avèrent être de formidables maîtres à
être, ou à penser.
Carole Fives montre aussi la
place si marginale que la peinture à pris depuis vingt ans dans l’enseignements
des Arts.
Comme si le concept, l’Idée prenait
toute la place et supprimait l’envie de simplement vouloir dessiner.
Térébenthine montre enfin
que l’Ecole des Beaux-Arts est restée dans son enseignement machiste. En
mettant à l’honneur, les œuvres majeures d’artistes internationaux,
majoritairement masculins.
Alors que Carole Fives nous donne
elle-même au fil des pages des informations très riches sur les femmes qui se
sont illustrées dans les Arts au fil des âges.
L’auteur fait enfin un parallèle entre
peinture et écriture, et montre qu’exprimer sa sensibilité par ces deux
pratiques peut avoir des points communs.
Carole Fives sort ici de ses thèmes de prédilection, de sujets plus intimes (la mère et l’enfant dans Tenir jusqu'à l'aube ou la relation à la mère dans Une femme au téléphone), et le fait encore avec énormément de talent.
Térébenthine
se lit d’une traite. A conseiller aux amateurs des romans de Carole Fives, et
aux autres qui pourraient apprécier ce roman qui se distingue des précédents
titres de l’auteur, qui pourrait bénéficier ici d'un plus large lectorat.
© Véronique Meynier, Article publié le 04/10/2020 et mis à jour le 29/03/2024.
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