Tout s'est bien passé / Emmanuèle Bernheim


Tout s'est bien passé / Emmanuèle Bernheim.- Paris : Gallimard, 05/2014, 205 p.

Citations d'Emmanuèle Bernheim.

Ce roman d'Emmanuèle Bernheim a été adapté par François Ozon, dont le film avec Sophie Marceau sort en salles le 22/09/2021.

  

Tout s'est bien passé n'est pas un livre ordinaire. Il ne raconte pas un épisode de vie banal, oublié aussitôt qu’il survient.

Emmanuèle Bernheim y narre la fin de vie de son père, André, qui après un AVC, un infarctus cérébral, un anévrisme des carotides et une dépression sévère, fait le choix de mettre fin à ses jours, de recourir à l'euthanasie.

En  2009, année de cette décision, ce choix n'est pas autorisé en France, où ceux qui le faciliteraient seraient condamnables par la justice. 

André a 89 ans, est dépressif chronique, et se sent désormais habiter un corps diminué, et exprime un état de mal-être extrême qu'Emmanuèle, sa fille, comprend, et communique à une femme d'une association suisse dont elle souhaite l'appui pour pouvoir apporter à son père l’aide qu’il sollicite : "Je lui raconte tout, l'AVC, la dépression, et mon père qui ne se reconnaît plus. Ce n'est plus lui." (p. 86).

Cette autobiographie très surprenante est digne. Elle a le mérite de parler d'un sujet grave qui chaque année bouleverse des êtres et leurs proches, qui se retrouvent plus souvent à la Une des journaux et des Faits divers, que comme personnage de roman de la rentrée littéraire.

Emmanuèle Bernheim ne donne ni leçon, ni réponse sur ce sujet grave et toujours tabou aujourd'hui de l'euthanasie.

Mais son témoignage interroge le lecteur d'une manière subtile et très concrète.

Que ferait chacun de nous confronté à une demande pareille d'un parent, qui souffrirait, saurait qu'aucun traitement ne soulagera plus jamais ses blessures ou douleurs, et déciderait en toute conscience d'arrêter son chemin qui ne le mènerait que dans le mur ?

Emmanuèle Bernheim, scénariste (a écrit les scénarios des films Sous le sableSwimming Pool et 5×2 avec François Ozon) et auteure (1993 : Prix Médicis pour son livre Sa femme) maîtrisait forcément l'écriture qui s'avère ici : vive, sans temps mort, sans aucune hésitation ni exposé inutile. Elle avance avec simplicité et en allant directement à l'essentiel d'une histoire qui aurait pu être glaçante.

Son habileté réside dans sa sobriété, sa force dans un amour absolu d'écouter et d'apaiser celui qui lui a donné la vie, et qui ne veut plus vivre un jour de plus.

Roman inhabituel qui n’endort pas le lecteur, mais le fait réfléchir, à sa vie, à la vie de ses proches et à l’absence qui peut survenir brutalement, à tout instant.



© Véronique Meynier, le 08/07/2019. Article mis à jour le 19/08/2021.

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