Livret de famille : suivi de La Trempe / Magyd Cherfi
Livret de famille : suivi de La Trempe / Magyd Cherfi.- Arles : Actes Sud, 2011, 250 p. (Babel)
Citations de Magyd Cherfi. Conseil de lecture de La vie de ma mère ! de Magyd Cherfi.
Chroniques courtes faites de souvenirs sous forme de courts récits, ce Livret de famille a déjà la qualité de l’écriture. Magyd Cherfi, qui s’est fait connaître dans les années 90 en étant le parolier du groupe toulousain Zebda, aime les mots, a une écriture autant soignée qu’elle est naturelle, vraie.
Ces petits textes excellent à décrire «la cité», ses codes, son univers et ses particularités sombres.
Enfant et adolescent, Magyd Cherfi a vécu dix-sept dans une cité, la cité Bleuet de Toulouse, où «fallait beugler, être moche, boiter, avoir les dents cassées… si ta bouche était un cimetière t’étais bien noté.» (p. 11).
«On était pauvres jusque dans les mots.» (p. 13).
Mais Magyd Cherfi a une chance et une malchance : une mère qui ne parle pas un mot de français, mais croit plus que tout en ses enfants, en leur chance de réussite et de progression grâce à l’école de la République.
La nouvelle «Le bleu de travail» présente dans La trempe est à ce sujet magnifique.
«J’ai perdu mon grand frère à l’âge de douze ans. Je veux dire que je l’ai perdu d’une certaine façon le jour où l’école lui a signifié qu’il était temps pour lui de penser à la vie active et de choisir un métier pour son avenir. » (p. 113)
«C’est quand mon grand frère est entré que maman s’est écroulée sur sa chaise. […] Je l’ai aperçue en boule se détruisant sous mes yeux. […] Elle pressait ses côtes avec ses mains pour contenir une infinie détresse.» (p. 121).
Depuis cette déception, ce rêve brutalement anéanti de voir réussir son enfant, elle se fermera aux autres, et n’aura plus un geste d’affection, la douleur de l’existence la faisant ployer sous le poids du quotidien.
Le recueil regorge également de positions bien trempées sur le Ministère de l’Identité Nationale de Nicolas Sarkozy notamment, et le mal que ce prétendu vœu d’intégrer les multiculturalismes en leur demandant plutôt de nier leurs origines a fait au peuple français, qui pour sa majorité n’a pas besoin de loi ou de politique pour se sentir Français.
Ces récits se lisent avec plaisir et émotion par toute la profondeur et la vérité dont ils sont faits.
Pour poursuivre la lecture de Magyd Cherfi, je vous conseille ensuite Ma part de Gaulois, paru en 08/2016 chez Actes Sud également, pour poursuivre sur l'auteur et ses souvenirs qui collent à l'actualité notamment des banlieues.
Citations extraites de Livret de famille et de Ma part de Gaulois.
© Véronique Meynier, le 08/07/2017, mis à jour le 07/06/2019.
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