L'ivrogne dans la brousse / Tutuola Amos

L'Ivrogne dans la brousse / Amos Tutuola ; trad. de l'anglais par Raymond Queneau.- Paris : Gallimard, 1953, 197 p. (Du Monde entier).

Citations d'Amos Tutuola.


"Je me soûlais au vin de palme depuis l'âge de dix ans. Je n'avais rien eu d'autre à faire dans la vie que de boire du vin de palme. [...]. Mon père avait huit enfants et j'étais leur aîné, les autres travaillaient dur, moi j'étais un recordman du vin de palme. Je buvais du vin de palme du matin jusqu'au soir et du soir jusqu'au matin. A cette époque-là, j'en étais venu à ne plus boire une seule goutte d'eau ordinaire, seulement du vin de palme. Quand mon père s'est aperçu que je ne pouvais rien faire d'autre que de boire, il a engagé pour moi un excellent malafoutier qui n'avait rien d'autre à faire qu'à me préparer mon vin de palme pour la journée." (début du roman).

Voici comment l'auteur nigérian, Amos Tutuola lance l'histoire de L'Ivrogne dans la brousse, et de son personnage principal, qui se fait appeler Père-Des-Dieux-Qui-Peut-Tout-Faire-En-Ce-Monde, et qui ne peut pas vivre sans boire son si bon vin de palme.

Mais malheureusement, si son malafoutier prenait soin de lui comme personne, en lui préparant cent-cinquante calebasses de vin de palme chaque matin, et cela durant un service de quinze longues années, le tireur de vin de palme tombe en pleine action, au pied du palmier, où il sera retrouvé, et enterré dans la journée.

Mais pour notre ivrogne de la brousse, la vie n'a plus de sens. Il n'a plus qu'une idée en tête. Partir de sa ville natale. Parcourir la brousse. Et retrouver son défunt malafoutier.

La quête du malafoutier est l'histoire de ce roman, à l'imaginaire insolite et vertigineux.

A l'époque, la brousse et les forêts étaient épaisses, les villes et les villages très éloignés les uns des autres, la recherche du défunt malafoutier s'avérera donc forcément extrêmement longue.

Plusieurs mois de marche dans la brousse, à croiser des esprits, des dieux, à chercher des renseignements, à aller à la maison de Mort, à voir des êtres louer leurs pieds dans des forêts...

Mais une chose est sûre. Dans tous les villages de la brousse, après avoir pris tous les renseignements pour avoir la chance de retrouver le défunt malafoutier, Père-des-Dieux-Qui-Peut-Tout-Faire-En-Ce-Monde se dirige vers La-Ville-Des-Morts.

C'est sûr, son ami malafoutier est là-bas. Et même si la route est longue, le retrouver, même mort, est la seule chance de pouvoir à nouveau boire son excellent vin de palme.

Amos Tutuola nous emmène par ce conte, dans un univers absurde, et sans aucun repère. Mais son imaginaire, ses personnages fantaisistes si humains et attachants, donne au lecteur qui franchit la couverture, l'envie de rester dans ce monde, où que l'on soit mort ou vivant, humain ou un arbre, chacun a la possibilité d'échanger, de comprendre, d'écouter, tout ce qui est croisé sur ce chemin de vie, de voyage.

Roman comme vous n'en avez jamais lu jusqu'ici. Qui plus est, traduit par l'immense Raymond Queneau qui dans la préface remercie ses amis Michel Leiris et Georges Balandier pour leur aide dans l'importance de traduire, en gardant le texte tel qu'Amos Tutuola l'avait écrit. Ce qui face à l'originalité n'a pas été facile, le risque étant de traduire par des concepts connus en France.

Merci à cette équipe de nous avoir permis de découvrir l'œuvre la moins transformée des mots de l'auteur, grâce au filtre de la traduction exigeante.

ⓒ Véronique Meynier, article écrit le 07/08/2023 et partagé sur mon Blog Littéraire de Conseils de Lecture - Ma Bibliothèque Idéale. Mis en ligne le 03/01/2024 à 15H46.

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